GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève M 3002-A Date de dépôt : 14 février 2025 Rapport de la commission des transports chargée d’étudier la proposition de motion de Diane Barbier-Mueller, Pierre Conne, Joëlle Fiss, Darius Azarpey, Murat-Julian Alder, Thierry Oppikofer, Geoffray Sirolli, Pascal Uehlinger, Alexis Barbey, Rémy Burri, Jean-Pierre Pasquier, Fabienne Monbaron, Pierre Nicollier, Jacques Jeannerat, Marc Saudan, Raphaël Dunand, Marjorie de Chastonay pour l’étude d’une liaison ferroviaire directe entre Genève et Londres Rapport de Céline Zuber-Roy (page 4) ATAR ROTO PRESSE – 80 ex. – 03.25 M 3002-A 2/17 Proposition de motion (3002-A) pour l’étude d’une liaison ferroviaire directe entre Genève et Londres Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève considérant : – que des études de l’Association européenne pour le développement du transport ferroviaire (AEDTF) montrent l’intérêt de développer les lignes ferroviaires de moyenne et longue distance en Europe 1 ; – que l’Union européenne a considérablement augmenté ces investissements pour le développement des lignes ferroviaires longue distance ; – que la mobilité sur des trajets longue distance a augmenté entre 1994 et 2019 2 ; – que, sur la même période, les déplacements pour affaires et pour loisirs ont augmenté ; – que la demande est forte pour le développement de lignes ferroviaires moyenne et longue distance 3 ; – la forte connexion entre Genève et Londres ; – la nécessité de créer de nouvelles liaisons de transport entre ces deux villes, en privilégiant l’alternative du ferroviaire ; – les bénéfices environnementaux et économiques à développer une telle connexion ; – que la société Eurostar a relancé d’anciennes lignes reliant Londres aux Alpes 4 ; 1 2 3 4 Vu sur : https://www.24heures.ch/ils-veulent-remplacer-les-avions-par-des-tgv673331764095 Source : Enquête Mobilité des Personnes, 1994, 2008, 2019 Source : Mobilité longue distance et choix modal en Europe : quel avenir pour les trains de nuit, bureau 6t, 2022 : https://www.utp.fr/system/files/2023-10/ 20220914_6t_rapport_mobilite_longue_distance_choix_modal_quel_avenir_pour _trains_de_nuit.pdf Vu sur : https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/transports/eurostarrelance-une-liaison-vers-les-alpes_AV-202312210308.html 3/17 M 3002-A – que les créneaux aériens arrivent à saturation, avec près de 9 compagnies aériennes desservant quotidiennement Genève et Londres 5, jusqu’à 45 vols par jour entre ces deux villes ; – qu’une étude menée sur mandat de la Confédération mentionne l’intérêt de développer une connexion ferroviaire directe entre Genève et Londres 6 ; – que le Conseil fédéral indique être favorable à une liaison ferroviaire directe entre Bâle ou Genève et Londres 7 ; – que les Chemins de fer fédéraux (CFF) envisagent un train direct entre Bâle et Londres 8 ; – qu’une connexion directe entre Genève et Londres serait plus courte qu’une connexion entre Bâle et Londres 9, invite le Conseil d’Etat – à étudier de manière approfondie, en collaboration avec les CFF, l’opportunité et l’évaluation des coûts en vue de la mise en place d’une connexion directe entre Genève et Londres ; – à proposer à la Conférence des transports de la Suisse occidentale (CTSO), pour 2026, un objectif d’offre d’une ligne directe entre ces deux villes ; – à évaluer le montant et les modalités d’une garantie de déficit afin de lancer une ligne directe entre la capitale britannique et Genève. 5 6 7 8 9 Vu sur : https://www.ebookers.ch/fr/lp/vol/180003/178279/de-geneve-a-londres Source : Etude des potentiels ferroviaires pour les liaisons internationales, OFT, 2021 Vu sur : https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft? AffairId=20233036 Vu sur : https://www.rts.ch/info/suisse/14490410-les-cff-envisagent-un-traindirect-entre-bale-et-londres.html Vu sur : https://www.bav.admin.ch/dam/bav/de/dokumente/aktuell-startseite/ berichte/perspektive-bahn-2050/internationaler-personenverkehr.pdf.download. pdf/Studie%20-%20Internationaler%20Personenverkehr.pdf M 3002-A 4/17 Rapport de Céline Zuber-Roy La proposition de motion 3002 a été déposée le 1er mars 2024 et a pour objectif de confirmer le fort intérêt de notre canton pour la mise en place d’une connexion ferroviaire directe entre Genève et Londres et de soutenir les études y relatives. La commission des transports a examiné cette proposition de motion lors d’une séance, le 21 janvier 2025, sous la présidence de Mme Gabriela Sonderegger. M. David Favre, directeur général des transports, a suivi les travaux sur cet objet et le procès-verbal a été rédigé par Mme Pauline Ley. L’auteur de ce rapport remercie vivement toutes ces personnes. I. Présentation de Mme Diane Barbier-Mueller, auteur Mme Barbier-Mueller rappelle que l’Office fédéral des transports a présenté il y a deux ans la stratégie « Perspective Rail 2050 », qui définit les orientations en matière de transport ferroviaire de voyageurs et de marchandises, avec une augmentation prévue de l’offre de 24% en moyenne. Elle souligne le fort potentiel de développement de la région de Genève et Vaud, en particulier pour la liaison ferroviaire Genève-Londres. Actuellement, les liaisons aériennes entre ces deux villes comptabilisent plus de 50 000 usagers. La ligne LondresBâle ainsi que les liaisons combinées Londres-Zurich comptent plus de 45 vols répertoriés en 2024. Elle note un intérêt populaire significatif, illustré par une pétition en ligne qui a recueilli plus de 6000 signatures en peu de temps. Elle rappelle qu’en 2010, Eurostar avait exprimé son intérêt pour le développement de cette liaison, prévoyant à l’époque un arrêt à Lille pour effectuer les contrôles douaniers. Un article du Dauphiné évoquait déjà la perspective de réalisation de cette ligne pour 2014. Bien que ces prévisions se soient avérées trop ambitieuses, Eurostar vise aujourd’hui un doublement de sa capacité d’ici 2030, passant de 19 à plus de 30 millions de passagers. Mme Barbier-Mueller insiste sur la nécessité d’une implication forte du canton de Genève, soulignant que les CFF concentrent actuellement leurs efforts sur le développement du réseau interne ainsi que sur des liaisons internationales principalement en direction de Zurich et Bâle, au détriment de la Suisse occidentale. Une interpellation en date du 10 décembre 2024 par M. Pascal Broulis a mis en lumière cette inégalité, et demandé des explications au Conseil fédéral sur la place de la Suisse occidentale dans les stratégies de développement ferroviaire. Elle propose l’audition de M. David Fattebert, directeur des CFF pour la Suisse romande, qui dispose d’une expertise approfondie sur cette question, ainsi que de M. David Pouget, député 5/17 M 3002-A Vert’libéral du canton de Vaud, qui a également formulé un postulat en faveur de cette liaison et mené des discussions avec les CFF. L’intérêt pour cette liaison est soutenu par plusieurs cantons romands, notamment Vaud et Fribourg, qui ont formulé des postulats en ce sens. Mme Barbier-Mueller insiste sur le fait que les décisions se prennent aujourd’hui et qu’il est crucial que Genève adopte une position forte pour ne pas être laissée de côté. Elle mentionne que des développements récents, notamment l’interpellation de M. Pascal Broulis le 28 mai 2024, relayée par la Tribune de Genève, indiquent que les obstacles financiers ne sont pas un frein, la Confédération étant disposée à financer une partie des infrastructures nécessaires. Le principal obstacle réside dans la nécessité de créer un quai de douane spécifique en raison du statut non Schengen du Royaume-Uni. Toutefois, l’avant-projet de la gare souterraine de Genève est en cours et pourrait inclure cette infrastructure. Elle souligne que l’homologation d’Eurostar sur les infrastructures ferroviaires suisses constitue un autre défi, mais qu’il ne s’agit pas d’un obstacle majeur, des solutions alternatives existant, telles qu’une correspondance à Genève. Mme Barbier-Mueller conclut en appelant à ce que le Conseil d’Etat de Genève s’implique activement dans cette opportunité et la porte lors de la Conférence des transports de la Suisse occidentale prévue en 2026. Question des commissaires Un député UDC exprime ses préoccupations quant à la faisabilité du projet, soulignant que le Conseil fédéral et les CFF ont clairement indiqué que l’extension de lignes internationales n’était pas à l’ordre du jour. Au contraire, leur priorité est d’investir le strict minimum à l’international et de concentrer leurs efforts sur le développement du réseau ferroviaire suisse existant. Il rappelle que, lors de précédentes auditions, notamment dans le cadre de la motion MCG sur la liaison avec l’Italie, les CFF ont réaffirmé leur position en indiquant que la création de nouvelles lignes ou la réactivation d’anciennes n’entrait pas dans leurs priorités actuelles. Bien qu’il reconnaisse l’intérêt du projet et la sensibilité de M. Fattebert aux enjeux romands, il s’interroge sur la capacité à inverser cette tendance, compte tenu des déclarations officielles. Selon lui, solliciter le Conseil d’Etat pour approcher la Confédération ou envoyer une résolution à Berne reviendrait à adopter une démarche traditionnelle qui, dans le contexte actuel, risquerait de ne pas aboutir. Il souligne qu’un argument clé en faveur de cet investissement fait défaut. Il estime qu’une justification solide et convaincante est nécessaire pour démontrer l’importance de la mise en place ou de la réouverture d’une liaison ferroviaire directe entre Genève et Londres. Il conclut en affirmant que c’est M 3002-A 6/17 cet argument qui manque aujourd’hui pour légitimer une action concrète en faveur du projet. Mme Barbier-Mueller rappelle que l’argument selon lequel les CFF n’ont pas inscrit la liaison ferroviaire Genève-Londres à leur agenda a déjà été avancé par le passé. A l’époque, il était affirmé qu’une telle liaison ne serait envisageable qu’après 2070. Cependant, lors d’un échange avec un responsable des CFF, il a été précisé que cette affirmation n’était pas validée en interne et que des réflexions étaient en cours. Les CFF étudient différentes variantes pour un terminal à Genève, avec un horizon de mise en œuvre fixé entre 2030 et 2040 pour une liaison directe. Elle souligne ainsi l’importance d’une audition approfondie d’un responsable des CFF, comme M. Fattebert, afin d’obtenir des clarifications officielles. Elle rappelle que cette thématique a été renforcée par l’interpellation de M. Broulis en mai dernier, postérieure à sa propre motion de mars. M. Broulis a obtenu confirmation que l’Office fédéral des transports a chargé les CFF de mener des études de faisabilité portant sur les gares de Genève, Bâle et Zurich. Ces études, initialement prévues pour 2024, ont pris du retard mais restent en cours. Elle insiste sur l’importance d’agir rapidement, arguant que les études en cours sont une opportunité pour Genève de s’impliquer activement. Elle rappelle les chiffres de fréquentation, avec 1,15 million de passagers pour la liaison GenèveLondres, contre 1,1 million pour les liaisons cumulées Londres-Zurich et Londres-Bâle, soit une différence de 50 000 passagers en faveur de Genève. Ces données démontrent le potentiel économique et stratégique de la région pour une telle connexion ferroviaire. Elle met en garde contre le risque que l’absence d’engagement de Genève soit interprétée comme un manque d’intérêt, ce qui pourrait compromettre les perspectives de développement de cette liaison. Elle conclut en affirmant qu’il est crucial que Genève se positionne dès maintenant, plutôt que d’attendre une décennie supplémentaire. Un député Vert s’interroge sur le fait que la réflexion se concentre essentiellement sur les CFF, soulignant que ces derniers peuvent parfois manquer de réactivité, en particulier lorsqu’il s’agit de projets concernant Genève. Il demande si d’autres pistes ont été explorées, notamment en envisageant des partenariats avec d’autres opérateurs ferroviaires. Il suggère de ne pas se limiter exclusivement aux CFF dans la motion et de faire preuve de davantage de créativité. Etant donné que cette liaison ne sera pas assurée exclusivement par des trains suisses, il estime pertinent d’explorer des collaborations potentielles avec des opérateurs ferroviaires étrangers, tels que des entreprises françaises ou d’autres acteurs du secteur. Mme Barbier-Mueller rappelle que l’objectif est de mettre en place une liaison ferroviaire directe, ce qui nécessite l’utilisation de trains homologués 7/17 M 3002-A pour circuler dans le tunnel sous la Manche. Actuellement, seuls les trains Eurostar répondent à ces exigences. Toutefois, le problème réside dans le fait que ces trains ne sont pas homologués pour circuler sur le réseau ferroviaire suisse. Elle précise que cette question a été soulevée auprès du Conseil fédéral, notamment en envisageant la possibilité de financer Eurostar ou un autre opérateur ferroviaire afin d’assurer cette liaison. En réponse, le Conseil fédéral a indiqué que la Suisse avait la capacité financière d’assumer elle-même un tel investissement. Mme Barbier-Mueller exprime néanmoins le sentiment que le Conseil fédéral ne souhaite pas ouvrir le marché suisse à Eurostar et préfère conserver le contrôle de son réseau ferroviaire. Elle estime que le temps pris pour avancer sur ce dossier n’est pas une question de moyens, mais davantage de stratégie et de volonté politique. Le Conseil fédéral a déjà investi dans le développement des liaisons ferroviaires vers l’Italie, démontrant qu’il dispose des ressources nécessaires. Toutefois, la Suisse occidentale, tant pour les liaisons internes qu’internationales, reste quelque peu négligée dans la stratégie actuelle de développement du réseau ferroviaire. Le député Vert suggère d’explorer la possibilité d’une participation suisse au sein d’Eurostar afin de surmonter les obstacles actuels liés à l’homologation des trains. Mme Barbier-Mueller indique que la possibilité d’une participation suisse à Eurostar a été envisagée et soumise au Conseil fédéral, mais que cette option a été écartée. Le Conseil fédéral a préféré conserver le contrôle du projet et gérer lui-même son développement plutôt que de financer une entreprise externe. Elle précise qu’Eurostar a défini ses axes stratégiques pour la prochaine décennie, privilégiant un développement vers l’Allemagne plutôt que vers la France et la Suisse. Cependant, elle estime qu’il serait pertinent d’encourager Eurostar à reconsidérer les projets qu’elle envisageait en 2010. L’entreprise semble avoir renoncé à ces projets en raison de l’absence de concrétisation depuis 15 ans, mais il serait possible de les relancer. Elle souligne également que des discussions sont en cours entre le Conseil fédéral et Eurostar. Ces échanges, prévus en début d’année, portent non seulement sur la liaison Genève-Londres, mais également sur d’autres axes de développement ferroviaire en partenariat avec différents opérateurs. Un député Vert indique qu’il ne dispose pas des références précises des réponses fournies par le Conseil fédéral concernant cette question. Mme Barbier-Mueller précise que la principale réponse du Conseil fédéral provient de l’interpellation 24.3493, déposée par M. Pascal Broulis en mai 2024. Cette interpellation a été reprise dans un article de La Tribune de Genève publié le 8 septembre 2024. M 3002-A 8/17 Mme Barbier-Mueller revient sur la question de la faisabilité du projet qui est abordée de manière approfondie dans le document Perspective Rail 2050. Elle recommande une autre audition, celle de M. Sébastien Munafo, du bureau 6t de la recherche en mobilité, qui a contribué à l’élaboration de ce rapport. Elle précise que ce rapport met en évidence le potentiel de développement du réseau ferroviaire, en particulier pour la région de Genève. De plus, M. Munafo serait particulièrement compétent pour répondre aux interrogations sur la faisabilité du projet et apporter un éclairage pertinent sur les opportunités de développement ferroviaire. Un député socialiste soutient dans son ensemble ce texte malgré quelques questions de compréhension et de détail. Il cherche à clarifier un point concernant les quais à Genève pour les départs vers Londres, se demandant si l’idée évoquée consiste à étendre la gare ou s’il a mal interprété. Mme Barbier-Mueller précise que le principal problème réside dans l’absence de capacité d’accueil à Genève pour un quai de douane, élément indispensable à la mise en place de la liaison directe avec Londres. Elle explique que, dans le cadre de l’avant-projet de la gare souterraine de Genève, il pourrait être envisagé d’adapter un quai existant afin d’y intégrer l’infrastructure douanière requise. Forte de son expérience dans le secteur du bâtiment, elle reconnaît la complexité de modifier un projet en cours, mais estime qu’il serait pertinent d’évaluer cette possibilité, compte tenu de l’intérêt manifeste pour cette liaison. Le député socialiste soulève une autre question concernant la problématique des quais et suggère une solution alternative. Il propose d’envisager une liaison entre Genève et Bruxelles-Amsterdam, avec une correspondance à Lille pour rejoindre Londres, où toutes les infrastructures nécessaires sont déjà en place. Cette option permettrait d’établir une connexion directe dès à présent, tout en desservant des destinations comme Bruxelles et Amsterdam, qui figurent parmi les dix destinations les plus fréquentées de l’aéroport de Genève. Mme Barbier-Mueller indique qu’en 2010, lors des premières études sur la liaison Genève-Londres, l’option d’un trajet passant par Lille avait été envisagée, avec un itinéraire Genève-Lille, puis Lille-Londres. Toutefois, elle souligne que l’avantage principal d’une liaison directe réside dans la réduction des temps de trajet. Le risque d’ajouter des correspondances, comme celles suggérées via Bruxelles ou Amsterdam, est d’allonger la durée totale du voyage, rendant le train moins attractif par rapport à l’avion. L’objectif de la motion est précisément de rendre le train compétitif en termes de durée, en offrant un trajet de 5 à 6 heures, ce qui permettrait de gagner du temps sur les procédures d’aéroport, les contrôles douaniers, et les déplacements vers les 9/17 M 3002-A centres-villes. Trop de correspondances risqueraient donc de dissuader les voyageurs, qui continueraient à privilégier l’avion. Le député socialiste demande si le développement d’une liaison ferroviaire efficace entre Genève et Londres permettrait de réduire le nombre de vols quotidiens sur cette destination. Mme Barbier-Mueller répond en précisant que cette question dépasse son champ de compétences, n’étant pas chargée des questions de mobilité. Toutefois, à titre personnel, elle estime qu’une réduction du nombre de vols pourrait être envisageable sans compromettre l’attractivité de l’aéroport de Genève, qui propose de nombreuses autres destinations stratégiques. Avec les 45 vols quotidiens actuellement en place entre Genève et Londres, elle considère qu’une diminution partielle serait réaliste. Une députée socialiste souligne que, contrairement aux préoccupations exprimées par le député UDC sur la faisabilité et l’adhésion autour du projet, cette proposition bénéficie d’un large soutien, Genève n’étant pas seule dans cette démarche. Elle rappelle notamment le soutien de M. Broulis à une proposition similaire. Elle propose d’élargir la portée de la motion en envisageant non seulement une liaison directe Genève-Londres, mais aussi en utilisant cet axe pour établir des connexions directes vers Bruxelles et Amsterdam. Elle suggère que certaines lignes pourraient se diriger vers Londres, tandis que d’autres poursuivraient leur trajet vers Bruxelles et Amsterdam, avec une correspondance potentielle à Lille. Mme Barbier-Mueller exprime son accord avec cette proposition et souligne que Genève a été quelque peu négligée dans les stratégies de développement des CFF et du Conseil fédéral ces dernières années. Elle estime qu’il serait opportun de demander un réajustement en faveur de nouvelles liaisons directes, y compris celles reliant Genève à Bruxelles et Amsterdam. Elle met en avant l’intérêt croissant du public pour ces connexions ferroviaires, soulignant que le train attire un large éventail de voyageurs, des hommes d’affaires aux jeunes voyageurs. Un député Vert évoque les principales contraintes du projet, notamment la nécessité d’un espace douanier dédié à la gare de Genève en raison du statut non-Schengen du Royaume-Uni, ainsi que l’incompatibilité du matériel roulant Eurostar avec les infrastructures suisses. Il s’interroge sur la faisabilité d’une infrastructure douanière à Cornavin, compte tenu de la capacité des trains Eurostar (environ 900 passagers par rame). Il souligne que, pour rentabiliser un tel projet, il faudrait assurer un certain nombre de liaisons quotidiennes et il propose d’examiner la possibilité d’utiliser les infrastructures de l’aéroport de Genève, qui pourraient être mieux adaptées. M 3002-A 10/17 Mme Barbier-Mueller répond que la gare de Cornavin est prévue pour être agrandie, ce qui permettra d’améliorer le flux des passagers. Selon les études antérieures, la rentabilité de la liaison était estimée avec une fréquence de 2 à 3 passages par jour, basée sur des trains d’une capacité de 750 passagers, un chiffre aujourd’hui revu à la hausse à 900 passagers. Elle rappelle que l’adaptation des trains Eurostar au réseau suisse est un enjeu connu qui concerne également Zurich et Bâle. Le Conseil fédéral s’est dit prêt à investir dans cette adaptation. Concernant l’idée d’une extension vers l’aéroport, elle estime qu’il serait pertinent d’étudier cette option en tenant compte du profil des voyageurs, notamment des touristes venus pour les stations de ski, déjà bien desservies par le Léman Express. Le député Vert insiste sur la nécessité de garantir un passage rapide des passagers en douane afin de rendre la liaison ferroviaire attractive. Il soulève la question de la faisabilité d’un tel investissement par les douanes suisses, en raison du faible nombre de liaisons quotidiennes envisagées et des contraintes d’espace et de ressources nécessaires. Mme Barbier-Mueller conclut en indiquant que la mise en service de la liaison n’interviendra pas avant une dizaine d’années, laissant ainsi le temps de trouver des solutions innovantes, notamment grâce aux avancées technologiques telles que l’intelligence artificielle, pour accélérer les contrôles douaniers. II. Audition de M. Pierre Maudet, conseiller d’Etat, de M. David Favre, directeur général des transports, et de M. Benoît Pavageau, directeur des transports collectifs (OCT-DT) M. Pavageau commente une présentation (cf. annexe). Il précise que les invites de la motion demandent une étude approfondie des CFF sur l’opportunité d’une ligne ferroviaire directe entre Genève et Londres, l’appui de cette demande par la CTSO, ainsi qu’une évaluation du modèle économique associé. Il informe que les CFF ont déjà été mandatés par l’OFT pour examiner les conditions et les délais de réalisation d’une telle liaison. Les études sont en phase finale, avec des précisions attendues d’ici à l’été ou au plus tard à la rentrée prochaine. Il attire l’attention de la commission sur une difficulté majeure liée au développement de cette ligne : le fait que, depuis le Brexit, le Royaume-Uni ne fait plus partie de l’espace Schengen. En conséquence, comme c’est le cas pour les liaisons Eurostar vers Amsterdam, Bruxelles ou Londres, les voyageurs doivent passer par un contrôle frontalier similaire à celui d’un aéroport. Cela nécessite l’aménagement d’une gare totalement hermétique, où les contrôles seraient effectués au départ et non à l’arrivée. Les CFF analysent actuellement la faisabilité d’un tel dispositif à Genève, en 11/17 M 3002-A étudiant des options comme les gares de Sécheron ou de Cornavin, tout en admettant que, si ces solutions ne s’avèrent pas réalisables, une autre localisation devra être envisagée. Concernant le financement, M. Pavageau rappelle que le Parlement a adopté la loi LCO2, qui prévoit des mesures de soutien au développement des lignes ferroviaires internationales. Toutefois, aucune garantie de subvention n’existe pour l’instant. Le canton de Genève est bien entendu favorable au développement du trafic ferroviaire international au départ de Genève, mais pas nécessairement sous la forme d’une liaison directe. Il soulève la possibilité d’une mutualisation de la ligne jusqu’à Lille, où une gare hermétique est déjà en place, permettant ainsi aux voyageurs de procéder à un simple changement, ce qui éviterait des aménagements coûteux à Genève. Il conclut en soulignant l’intérêt stratégique de cette liaison, avec un temps de parcours estimé à environ 5h30 entre le centre-ville de Genève et celui de Londres. Une telle offre représenterait une alternative compétitive aux vols moyen-courriers, offrant une solution de transport durable et efficace. M. Favre apporte des précisions en lien avec l’audition de Mme BarbierMueller et les récentes discussions avec les CFF sur la liaison ferroviaire Genève-Londres. Il souligne que la principale difficulté réside dans la mise en place d’un « quai stérile », et non dans la construction de nouvelles infrastructures ou de nouvelles lignes. Bien que la création d’un quai hermétique soit un projet conséquent, il ne s’agit pas d’une entreprise d’une ampleur comparable à la construction d’une nouvelle ligne ferroviaire. Il précise que la principale contrainte technique ne concerne pas l’homologation des trains Eurostar, mais plutôt la compatibilité du courant électrique. Tant que ces trains opèrent dans le périmètre de Cornavin ou sur la portion sous courant français, la problématique est moins complexe. L’extension au-delà, vers des destinations comme Lausanne ou Berne, poserait davantage de difficultés. M. Favre indique que les discussions récentes avec Eurostar montrent un intérêt de leur part pour une telle liaison, car ils disposent de matériel roulant en quantité suffisante. Le principal enjeu reste donc la mise en place d’une zone hermétique dans une gare genevoise. Il est cependant exclu de rouvrir le dossier de la gare souterraine de Cornavin, car celui-ci est finalisé pour une ouverture en 2038, suivie de plusieurs années de travaux de mise aux normes des quais existants. L’installation d’un quai totalement isolé pour seulement quelques liaisons quotidiennes est donc irréalisable dans les conditions actuelles. Il mentionne que tous les partenaires sont favorables au projet, mais que la question centrale est de savoir où l’installation d’un quai stérile serait la plus simple à réaliser. Une alternative envisagée est d’explorer la possibilité de liaisons avec d’autres opérateurs ferroviaires existants, comme Lyria. Cependant, Lyria rencontre actuellement un manque de matériel roulant, ce qui M 3002-A 12/17 rend difficile l’ajout de nouvelles liaisons sans réduire la desserte actuelle vers Paris. Il souligne aussi que la participation de la Suisse à Eurostar en tant qu’opérateur n’est pas nécessaire, car il s’agit d’un marché international ouvert. Il estime que l’obtention de sillons pour des trains Eurostar jusqu’à Genève ne poserait pas de problème, en particulier si des créneaux horaires non exploités sont disponibles. M. Pavageau précise qu’Eurostar exploite déjà, durant la saison hivernale, des trains directs reliant les stations de ski françaises au centre de Londres. Il souligne que cette liaison est déjà en place et opérationnelle, ce qui signifie que la mise en œuvre d’une connexion directe Genève-Londres ne constituerait pas une expérimentation, mais plutôt une extension d’un service existant et éprouvé. Question des commissaires Un député socialiste interroge sur la nécessité d’une gare hermétique en soulignant que les trains à destination de la France disposent déjà d’un dispositif similaire. Il demande également pourquoi la mise en place de ces contrôles ne pourrait pas se faire à Londres. M. Pavageau explique que, selon les accords du Brexit, les contrôles douaniers doivent obligatoirement être effectués au lieu de départ, et non à l’arrivée. Actuellement, la dernière voie de la gare Cornavin dispose d’une zone de contrôle dite « légère », grâce à un système de contrôle mobile. Cependant, ce dispositif est appelé à disparaître avec l’extension de la gare souterraine et devra être remplacé par une solution plus pérenne. Le député socialiste demande alors si la suppression de cet espace dédié est due à l’accord de l’espace Schengen. M. Pavageau confirme en expliquant que, grâce à cet accord, les contrôles douaniers actuels se font de manière aléatoire directement à bord des trains par des douaniers en déplacement. M. Favre ajoute que la réorganisation de la gare liée à son extension ne permet plus de conserver l’espace douanier actuel dans sa configuration. Il précise également que le temps de parcours estimé de 5h30 pour une liaison directe Genève-Londres serait extrêmement attractif. Actuellement, il est possible de se rendre à Londres en passant par Paris, ce qui implique un changement de gare et un temps total de 7h17. Cette option est disponible 3 à 4 fois par jour avec un double changement et des tarifs relativement compétitifs. 13/17 M 3002-A M. Maudet nuance ces propos en précisant que ce trajet via Paris est souvent sujet à des retards significatifs et à des suppressions de trains fréquentes, ce qui peut rendre l’itinéraire moins fiable pour les voyageurs. Un député Vert suggère d’améliorer la liaison Genève-Paris, en proposant une approche qui permettrait d’optimiser simultanément le trajet GenèveParis-Londres. Il s’interroge sur la possibilité de réduire le temps de parcours entre Genève et Paris afin de faciliter et de rendre plus attrayante la connexion vers Londres. M. Maudet répond que l’enjeu principal réside plutôt dans la liaison Genève-Lyon, qui constitue la porte d’entrée vers les lignes à grande vitesse. Il évoque une perspective de liaison Genève-Barcelone en 6 heures, en s’appuyant sur l’actuelle liaison quotidienne Barcelone-Lyon (départ à 8h30, arrivée à 13h15). La volonté de prolonger cette ligne jusqu’à Genève est bien présente, mais le principal obstacle réside dans le segment Lyon-Genève, qui souffre de nombreux problèmes. Cette desserte est actuellement complexe, en raison de la vétusté des infrastructures, notamment sur la section GenèveBourg-en-Bresse, qui est exploitée plusieurs dizaines de fois par jour par le TGV. Ces contraintes entraînent régulièrement des perturbations et des ralentissements, obligeant souvent les TGV à faire leur terminus à Lyon. La difficulté est donc triple : elle concerne la capacité d’exploitation, l’état du matériel roulant, et l’environnement général d’exploitation. Le Conseil d’Etat est convaincu que l’amélioration de cette liaison est un enjeu majeur. Une députée PLR conclut que l’accueil de la motion semble globalement favorable et demande si, pour la suite des travaux, une audition des CFF serait pertinente afin de démontrer l’intérêt de Genève pour cette liaison ou si cela ne serait pas nécessaire. M. Maudet confirme que l’accueil de la motion est positif. Il souligne que la connectivité aux lignes à grande vitesse est un enjeu crucial non seulement pour Genève, mais aussi pour toute la Suisse romande. Toutefois, il estime que les CFF ne nécessitent pas de nouvelle impulsion à ce stade. Sur le plan politique, il constate que l’intérêt des Chambres fédérales pour une expansion des CFF au-delà du territoire national reste modéré, ce qui est regrettable. Il souligne la nécessité d’une réciprocité dans les relations transfrontalières, mais cette ouverture ne semble pas être une priorité au niveau politique suisse. M. Favre ajoute que, par le passé, le matériel roulant constituait un atout stratégique pour l’expansion ferroviaire à l’étranger. Or, les CFF n’ont pas investi dans du matériel compatible avec les réseaux ferroviaires italiens et allemands. Hormis les rames TGV et Léman Express, ils ne disposent pas de rames aptes à circuler sur les réseaux français. M 3002-A 14/17 Un député socialiste soulève deux questions. La première concerne la liaison Genève-Lyon, et il exprime son impression qu’il semble y avoir un choix à faire entre cette connexion et celles vers le nord, telles que Lille, Bruxelles, Amsterdam et Londres. Il s’interroge sur la possibilité de développer les deux axes simultanément, plutôt que de se limiter à l’un ou l’autre. Par ailleurs, il questionne la pertinence de privilégier Genève-Lyon pour améliorer la connexion vers Barcelone et Turin, alors que cette liaison ne permettra pas de réduire significativement le temps de trajet. Il demande pourquoi Genève-Lyon est considéré comme le seul enjeu majeur. M. Maudet répond que Genève-Lyon est le seul enjeu en matière d’infrastructure, car la ligne vers le nord existe déjà et ne nécessite pas d’importants investissements. L’amélioration de la liaison nord concerne davantage les services régionaux et l’optimisation de l’exploitation de la ligne existante. Il précise que le Conseil d’Etat n’est pas opposé au développement des deux axes, mais souligne que les acteurs concernés ne sont pas les mêmes, ce qui complexifie la coordination des projets. Le député socialiste pose ensuite une question relative à l’exploitation ferroviaire. Il s’interroge sur la possibilité pour des chemins de fer cantonaux de pallier un éventuel manque d’engagement des CFF dans les liaisons internationales. M. Maudet répond qu’un tel projet nécessiterait des ressources financières considérables, mais il souligne que la gestion des liaisons internationales relève en principe des CFF. Il évoque les récents accords bilatéraux en négociation, qui pourraient ouvrir la Suisse au cabotage ferroviaire. Cette évolution permettrait à des compagnies ferroviaires étrangères, comme celles opérant sur des liaisons Barcelone-Munich, d’effectuer des arrêts intermédiaires en Suisse et de proposer des tarifs compétitifs par rapport aux CFF. Si cet accord entre en vigueur, il pourrait entraîner des changements majeurs dépassant la simple échelle régionale. III. Discussion interne et vote Une députée PLR exprime son souhait d’avancer rapidement et estime qu’une audition supplémentaire n’apporterait pas d’éléments nouveaux. Elle propose de voter sans attendre. Un député Vert estime qu’il serait préférable d’attendre les résultats de l’étude en cours, attendus d’ici à l’été, pour disposer de données plus précises avant de prendre une décision. 15/17 M 3002-A La députée PLR répond que le Conseil d’Etat aura un délai pour répondre à la motion, ce qui lui permettra d’intégrer les résultats de l’étude dans son analyse. La présidente soumet au vote la M 3002 pour l’étude d’une vision ferroviaire directe entre Genève et Londres : Oui : Non : Abstentions : 14 (2 UDC, 3 PLR, 1 LC, 2 MCG, 1 LJS, 2 Ve, 3 S) – – Le M 3002 est acceptée et la catégorie de débat IV est proposée. M 3002-A 16/17 ANNEXE MOTION 3002 POUR L'ÉTUDE D'UNE LIAISON FERROVIAIRE DIRECTE GENÈVE-LONDRES SOUS-TITRE OFFICE CANTONAL DES TRANSPORTS DÉPARTEMENT DE LA SANTÉ ET DES MOBILITÉS 22.01.2025 Page 1 LA MOTION CETTE MOTION INVITE LE CONSEIL D'ETAT 1. à étudier de manière approfondie, en collaboration avec les CFF, l’opportunité et l’évaluation des coûts en vue de la mise en place d’une connexion directe entre Genève et Londres; 2. à proposer à la Conférence des transports de la Suisse occidentale (CTSO), pour 2026, un objectif d’offre d’une ligne directe entre ces deux villes; 3. à évaluer le montant et les modalités d’une garantie de déficit afin de lancer une ligne directe entre la capitale britannique et Genève. 22.01.2025 Page 2 17/17 M 3002-A LES ETUDES EN COURS • Les CFF ont été mandatés par l'OFT pour étudier dans quelles mesures, quelles conditions et quels délais une liaison directe Genève-Londres pourrait être réalisée. • Les résultats des études sont attendus prochainement. • La problématique principale réside dans la capacité à créer un quai dit stérile (obligation d'un contrôle douanier strict équivalent à un aéroport au regard de la sortie de la Grande-Bretagne de l'espace Schengen) • Proposer des objectifs d’offre et en évaluer le coût sans connaitre les conclusions de l’étude est prématuré. • Piste de financement via la LCO2 22.01.2025 Page 3 POSITION CANTONALE • Le Canton est très favorable au développement du trafic ferroviaire international au départ de Genève, pour connecter au maximum le Canton au reste de la Suisse et de l’Europe. • Le Canton suit avec attention le travail des CFF sur cette connexion qui pourrait être directe ou en correspondance dans une ville comme Lille. • Le temps de trajet évoqué par Eurostar de 5h30 entre Genève-Londres semble prometteur et apparait potentiellement attractif comme une bonne alternative aux liaisons aériennes. 22.01.2025 Page 4