GRAND CONSEIL PL 13203 de la République et canton de Genève Signataires : David Martin, Daniel Sormanni, Aude Martenot, Alberto Velasco, François Baertschi, Philippe de Rougemont, Rémy Pagani, Badia Luthi, Francisco Valentin, Nicole Valiquer Grecuccio, Dilara Bayrak, Jocelyne Haller Date de dépôt : 4 novembre 2022 Projet de loi modifiant la loi générale sur le logement et la protection des locataires (LGL) (I 4 05) (Soutenir les coopératives et leurs loyers abordables) Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève décrète ce qui suit : Art. 1 Modifications La loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, est modifiée comme suit : Art. 17, al. 1, lettre c (nouvelle), et al. 3, lettre d (nouvelle) 1 Le Conseil d’Etat peut, si les conditions du marché des capitaux l’exigent, se porter caution simple de prêts hypothécaires, pour autant qu’ils soient primés par des prêts de rang préférable atteignant au moins 60% de la valeur de l’immeuble, à dire d’expert, dans les cas suivants : c) les terrains situés en zone constructible et détenus par une coopérative d’habitation, sans but lucratif, dont les membres représentent au moins deux tiers de l’ensemble des futurs titulaires d’appartements et dont les fonds propres n’ont pas un rendement supérieur à 5%, après amortissement. 3 Cette proportion peut atteindre : d) 95% pour les terrains situés en zone constructible et détenus par une coopérative d’habitation, sans but lucratif, dont les membres ATAR ROTO PRESSE – 100 ex. – 11bis.22 PL 13203 2/4 représentent au moins deux tiers de l’ensemble des futurs titulaires d’appartements et dont les fonds propres n’ont pas un rendement supérieur à 5%, après amortissement. Art. 2 Entrée en vigueur La présente loi entre en vigueur le lendemain de sa promulgation dans la Feuille d’avis officielle. EXPOSÉ DES MOTIFS Depuis une vingtaine d’années, le canton de Genève a fait des coopératives d’habitation un des deux piliers de sa politique du logement social ; l’autre pilier étant les fondations immobilières de droit public. Cette volonté de développer les coopératives s’est concrétisée notamment par la création du Groupement des coopératives d’habitation genevoises (GCHG), qui est passé de 10 coopératives membres fondateurs en 1999 à 85 membres en 2022. L’Etat dispose ainsi d’un partenaire organisé pour développer sa politique du logement. L’intérêt des Genevoises et des Genevois pour les coopératives d’habitation est manifeste. On dénombre plus de 5000 ménages sur les listes d’attente des coopératives. Le fait que la RTS ait consacré en avril 2018 un Temps Présent à ce sujet confirme également le très fort intérêt de la population pour ce type de logement1. Les coopératives d’habitation sont sans but lucratif. Elles proposent des logements de qualité et à des conditions abordables. Elles peuvent proposer une grande mixité de catégories de logements : HBM, HLM, HM ou en loyer libre (ZDLoc). Les coopératives sont intéressantes pour l’Etat, car elles financent elles-mêmes les constructions prévues, tout en réalisant les buts sociaux souhaités. Les coopératives sont des sociétés de personnes et non de capitaux. 1 https://pages.rts.ch/emissions/temps-present/9495675-cooperatives-d-habitantsplus-belle-la-vie.html 3/4 PL 13203 La rareté foncière et la difficulté d’acquérir du foncier restent un frein au développement de ce type d’habitat. Historiquement, les coopératives ont beaucoup réalisé leurs projets sur des terrains publics, soit des communes, soit du canton. Toutefois, les réserves foncières des communes et du canton se sont considérablement réduites. Aujourd’hui, il convient donc d’encourager l’acquisition de terrains directement par des coopératives sans but lucratif. Or, aujourd’hui, la LGL limite l’application du cautionnement de l’Etat aux « logements » détenus par les coopératives. Le présent projet de loi souhaite étendre l’outil du cautionnement à l’acquisition de terrains à bâtir. Ces terrains ainsi acquis permettront la création de logements abordables, coopératifs et sans but lucratif. Les mécanismes existants aujourd’hui en faveur des coopératives – soit en particulier le cautionnement de 95% prévu à l’art. 17, al. 3 let. a, mais aussi le fonds LUP qui permet l’acquisition de terrains par la FPLC remis en DDP aux coopératives avec la condition de construire des logements LUP – ont permis aux coopératives de se développer principalement et de façon significative dans le domaine du logement LGL et LUP. L’extension du cautionnement à l’acquisition de terrains tel que proposé par le présent projet de loi permettra notamment aux coopératives de contribuer davantage à la production de logements à loyer libre ZDLoc, particulièrement recherchés par la classe moyenne et qui sont le parent pauvre, ces dernières années, de la production de logements en zone de développement. Les coopératives présentent la particularité d’être à la fois des acteurs privés de l’immobilier, tout en étant par définition statutaire à but non lucratif et non spéculatif. A ce titre, les coopératives sont qualifiées de maîtres d’ouvrages d’utilité publique (MOUP) au sens de la législation fédérale (à ne pas confondre avec le « logement d’utilité publique » au sens de la LUP genevoise). La coopérative constitue un acteur intéressant et atypique du marché du logement, car elle pratique le principe du « loyer couvrant les coûts ». Ainsi, elle joue un rôle de stabilisateur du marché et propose des loyers stables et raisonnables sur le long terme. De nombreuses études l’ont montré, les coopératives offrent sur le long terme les loyers les plus bas du marché. A Genève, cela a été mis en évidence par l’étude de l’OCSTAT de novembre 2019 qui révélait que le loyer moyen en coopérative y est entre 27% (pour les six-pièces) et 35% (pour les deux- PL 13203 4/4 pièces) plus bas que dans les logements hors coopératives2. « Sur le marché libre, le loyer moyen du cinq-pièces s’élève à 1842 francs, contre 1044 francs pour les coopératives. Pour un quatre-pièces, c’est respectivement 1484 francs et 795 francs. » Les coopératives sont aussi un moteur d’innovation sur d’autres plans : construction écologique, participation des habitants, communautés de consommation d’électricité solaire… autant de domaines où les coopératives – mues par la recherche de l’intérêt collectif et du long terme – contribuent activement à atténuer la crise du logement et l’émergence d’une nouvelle économie de la construction plus humaine, plus économe et plus durable. Grâce à ce projet de loi, les coopératives vont augmenter leurs capacités à développer leurs propres projets, et diminuer leur « dépendance » envers les terrains publics. Les terrains acquis directement par les coopératives leur permettront également de jouer plus en amont dans les projets urbains. Ce soutien, via un cautionnement, ne coûte pas à l’Etat et se justifie, car les jeunes sociétés coopératives notamment ne possèdent que peu de moyens pour lancer des projets immobiliers, alors que leur rôle stabilisateur dans le marché immobilier est reconnu et encouragé par la Confédération suisse et les cantons. Il convient de permettre aux coopératives de jouer aujourd’hui pleinement ce rôle et de combler la lacune existante. Nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un bon accueil à cette modification de l’article 17 de la LGL. Conséquences financières Charges et couvertures financières / économies attendues Le cautionnement envisagé n’implique aucun coût pour l’Etat. 2 OCTAT INFORMATIONS STATISTIQUES no 22, novembre 2019 : https://statistique.ge.ch/tel/publications/2019/informations_statistiques/autres_the mes/is_loyers_22_2019.pdf