GRAND CONSEIL PL 13204 de la République et canton de Genève Signataires : Murat-Julian Alder, Alexandre de Senarclens, Fabienne Monbaron, Jean Romain, Yvan Zweifel, Jean-Pierre Pasquier, Raymond Wicky, Céline Zuber-Roy, Cyril Aellen, Helena Rigotti, Antoine Barde, Jacques Béné, Beatriz de Candolle, Francine de Planta, Florian Gander, Stéphane Florey Date de dépôt : 7 novembre 2022 Projet de loi modifiant la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée (LMCE) (H 1 21) (Pour le respect de la hiérarchie du réseau routier de notre canton et une stratégie routière démocratique) Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève décrète ce qui suit : Art. 1 Modifications La loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, du 5 juin 2016, est modifiée comme suit : Art. 5, al. 4 (nouvelle teneur) 4 La moyenne ceinture routière n’est pas soumise au régime de priorité défini dans ces zones. La vitesse y est appliquée de manière uniforme de jour comme de nuit, de manière à assurer la fluidité du trafic. Art. 5A Limitation de vitesse (nouveau) 1 Le département fixe une vitesse maximale garantissant la fluidité du trafic et conforme à la hiérarchie du réseau routier. 2 Il élabore une stratégie routière de vitesse maximale qui tienne compte : a) de la hiérarchie du réseau routier et de la fluidité du trafic ; b) du principe de proportionnalité ; ATAR ROTO PRESSE – 100 ex. – 11bis.22 PL 13204 2/15 c) des conséquences de la réduction de la vitesse maximale sur les services d’urgence et de secours, les transports publics, les taxis et voitures de transport avec chauffeur, et le transport professionnel ; d) des autres facteurs que le bruit routier, tels que l’accidentologie et la pollution ; e) d’un examen, au cas par cas, de la situation sur les différents axes routiers du canton. 3 Cette stratégie est soumise à l’approbation du Grand Conseil, qui statue par voie de résolution, conformément à l’article 13 de la loi sur la mobilité, du 23 septembre 2016. Art. 7, al. 3, lettre a (nouvelle teneur), et al. 4, lettre b (nouvelle teneur) 3 En zone I : a) le département prend les mesures visant à limiter la vitesse à 30 km/h au maximum selon les conditions prescrites par le droit fédéral, en privilégiant sur les axes structurants des mesures d’assainissement excluant la réduction de vitesse ; 4 En zone II : b) des axes routiers structurants, soumis à une limitation de vitesse de 50 km/h au moins, sont aménagés de façon à garantir la fluidité du transport individuel motorisé ; Art. 2 Modifications à d’autres lois La loi sur la mobilité (LMob) (H 1 20) du 23 septembre 2016, est modifiée comme suit : Art. 12A Stratégie et plan d’action en matière de vitesse (nouveau) 1 Le Conseil d’Etat tient compte d’une vitesse maximale sur les différents axes routiers garantissant la fluidité du trafic conforme à la hiérarchisation du réseau routier. 2 Il élabore une planification en ce sens, soumise à l’approbation du Grand Conseil. Art. 13, al. 3 (nouveau) 3 Pour l’adoption du plan d’action en matière de vitesse et ses modifications, la procédure décrite à l’alinéa 1 est applicable. *** 3/15 PL 13204 La loi sur le réseau des transports publics (LRTP) (H 1 50), du 17 mars 1988, est modifiée comme suit : Art. 2, lettre b (nouvelle, les lettres b à e anciennes devenant les lettres c à f) Par étapes, le plan d’actions du réseau des transports collectifs conduit à la réalisation d’une offre de transports publics répondant au moins aux objectifs suivants dans tout le canton : b) la planification du Conseil d’Etat en matière de vitesse sur les différents axes routiers ne doit pas affecter la vitesse commerciale ; *** La loi sur les routes (LRoutes) (L 1 10), du 28 avril 1967, est modifiée comme suit : Art. 3, al. 2 (nouvelle teneur) 2 Elle tient compte des principes du libre choix et de la complémentarité des modes de transport, ainsi que de la fluidité du trafic. Art. 3 Entrée en vigueur La présente loi entre en vigueur le lendemain de sa promulgation dans la Feuille d’avis officielle. PL 13204 4/15 EXPOSÉ DES MOTIFS Le Conseil d’Etat, affirmant s’appuyer notamment sur la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée (LMCE), a communiqué le 19 janvier 2022 sa nouvelle stratégie cantonale de lutte contre le bruit routier proposant une réduction des vitesses autorisées de façon différenciée suivant l’importance des axes routiers et suivant les heures du jour et de la nuit. Cette stratégie prévoit notamment la limitation de la vitesse des véhicules à 30 km/h dans l’hypercentre de jour comme de nuit sur les axes structurants, et une généralisation du 50 km/h la journée et du 30 km/h la nuit sur d’autres axes, notamment les axes structurants en zone II et sur la ceinture urbaine. Le 10 octobre 2022, le département des infrastructures (DI) a publié un arrêté relatif à la modération de la vitesse maximale autorisée, pour lutter contre le bruit routier sur plusieurs axes du canton dans le cadre de la stratégie de vitesse communiquée le 19 janvier 2022. Les cartes ci-dessous exposent les modifications de vitesse apportées sur les différents axes routiers du canton. 5/15 PL 13204 Cet arrêté consacre notamment la limite de la circulation à 30 km/h sur quelque 450 rues, avenues, chemins, routes, carrefours, ronds-points et axes routiers du canton, de jour comme de nuit, comme le résume le tableau suivant, paru dans la Tribune de Genève le 18 octobre 2022. PL 13204 6/15 Il convient ici de rappeler la teneur de l’article 190 Cst-GE, notamment son alinéa 2 : Art. 190 Principes 2 [L’Etat] facilite les déplacements en visant la complémentarité, la sécurité et la fluidité des divers moyens de transport publics et privés. 7/15 PL 13204 La stratégie proposée par le Conseil d’Etat contrevient grandement à l’application de l’alinéa 2 de l’article susmentionné. En effet, il n’est aucunement prouvé que la stratégie mise en place par le Conseil d’Etat garantira la fluidité des différents modes de transport. Il convient donc de s’inquiéter des conséquences que cela pourra avoir sur la vitesse commerciale des transports publics. La stratégie du Conseil d’Etat contrevient par ailleurs à l’article 4 de la loi sur la mobilité (LMob) qui prévoit que la politique en matière de mobilité « veille à optimiser l’utilisation de chaque mode de transport afin de couvrir les besoins en déplacement sur le territoire cantonal ». Cette stratégie prévoit purement et simplement une réduction de moitié de la vitesse maximale autorisée pour de nombreux axes, et de 40% dans l’hypercentre. En cela, elle ne respecte pas la hiérarchie et les fonctionnalités du réseau routier. Si la limitation à 30 km/h peut être pertinente dans les quartiers résidentiels comme sur le réseau routier d’intérêt local, il est impératif de veiller au respect de la hiérarchie du réseau routier et de tenir compte des spécificités propres à chaque type de route, comme le rappelle M. Peter Goetschi, président central du TCS : « Chaque type de route a une fonction bien précise qui doit être respectée afin que la fonctionnalité du réseau soit garantie dans son ensemble ». Ainsi, les routes affectées à la circulation générale en milieu urbain (routes principales, routes de liaison) devraient, sauf exception, garder une limitation à 50 km/h, avec la possibilité pour les autorités de limiter la vitesse à 30 km/h ou de créer des zones 30 sur les routes collectrices, les routes de desserte et les routes de quartier, voire d’introduire les 20 km/h dans les zones de rencontre1. Il faut également tenir compte des réserves exprimées par de nombreux acteurs de la mobilité. Tant l’association des transports publics2 et les associations représentatives des services d’urgence que les milieux de l’économie expriment de fortes réserves sur la généralisation du 30 km/h. Les trams et les bus risquent une perte de leur attractivité pour les usagers et cela aura pour conséquence un report modal sur d’autres modes de transport. Plus particulièrement, il faut craindre une baisse de la vitesse commerciale et donc en parallèle une augmentation des coûts visant le maintien d’une offre de 1 2 https://www.tcs.ch/fr/le-tcs/presse/communiques-de-presse-2021/la-vitesse-enlocalite-doit-respecter-la-hierarchie-et-les-fonctionnalites-du-reseau-routier.php https://www.20min.ch/fr/story/le-30-km-h-en-ville-asphyxierait-les-transportspublics-461425243936 PL 13204 8/15 qualité. A Genève, la vitesse commerciale est déjà la plus basse de Suisse, la qualité des transports publics n’en sera donc que plus péjorée. Dans plusieurs villes de Suisse, les transports publics ont exprimé leurs craintes sur la généralisation du 30 km/h, comme à Fribourg3 ou à Zurich4. Les transports publics zurichois estiment par exemple qu’il faut une dépense supplémentaire de 20 millions pour engager du personnel additionnel, acheter 6 trams et 21 bus afin de compenser la baisse des cadences5. Une baisse de la vitesse sur les différents axes routiers, et pour conséquence une baisse de la vitesse des transports publics, irait par ailleurs à l’encontre des lignes directrices cantonales prises à cet effet, aussi dans le cadre de l’application de la LMCE. L’amélioration des vitesses commerciales et la fiabilisation des temps de parcours sont des objectifs clairement exprimés dans le plan d’actions des transports collectifs 2020-20246, d’autant plus qu’ils sont générateurs d’économies. A ce titre, la conséquence de la limitation de la vitesse sur les Transports publics genevois (TPG) est qu’il faudra débourser près de 50 millions, selon les estimations, pour garantir l’offre. A Lausanne, qui a appliqué une réduction généralisée de la vitesse sur certains axes de jour, et sur la majorité des axes routiers de nuit, les transports publics lausannois ont déjà dû mettre la main au porte-monnaie pour assurer la même offre. Le groupe PLR s’était d’ailleurs déjà inquiété à ce propos, en déposant la motion M 27947 en octobre 2021, actuellement pendante à la commission des transports, qui demandait une étude évaluant les conséquences de la nouvelle stratégie cantonale de lutte contre le bruit routier sur l’activité des TPG. Il avait par ailleurs aussi déposé la motion M 28248 en février 2022 qui demandait de surseoir sans délai à la stratégie de lutte contre le bruit routier et à la généralisation du 30 km/h et de mener une étude complète et indépendante, en bonne collaboration avec les milieux concernés, sur les conséquences de la limitation de la vitesse maximale, qui tienne compte notamment des éléments suivants : – les conséquences sur les vitesses commerciales des différentes lignes des TPG ; 3 https://www.rts.ch/info/regions/fribourg/12153397-a-fribourg-les-transports-publics- sinquietent-dune-reduction-de-vitesse-a-30-kmh.html 4 https://www.letemps.ch/suisse/30-kmh-un-cassetete-bus-publics 5 https://www.letemps.ch/suisse/generalisation-zones-30-seme-zizanie 6 https://www.ge.ch/document/15619/telecharger 7 https://ge.ch/grandconseil/data/texte/M02794.pdf 8 https://ge.ch/grandconseil/data/texte/M02824.pdf 9/15 PL 13204 – les coûts engendrés par un maintien de la qualité de l’offre des TPG ; – les conséquences sur les services de secours et d’urgence, tels que les pompiers, forces de police et ambulances ; – les conséquences sur le transport professionnel et privé ; – les autres mesures mises en œuvre dans le cadre de la stratégie cantonale d’assainissement du réseau routier. La motion M 2824 demandait en outre l’élaboration d’une stratégie de gestion de la vitesse maximale et d’assainissement du réseau routier cantonal et communal qui tienne compte des éléments suivants : – les conséquences de la réduction de la vitesse maximale sur les services d’urgence et de secours, les transports publics, les transporteurs, les taxis et chauffeurs, le transport professionnel ; – le principe de proportionnalité ; – la hiérarchie du réseau routier et la fluidité du trafic ; – les autres facteurs que le bruit routier, comme l’accidentologie et la pollution ; – les différentes zones jouxtant le réseau routier, telles que les zones d’habitat et les zones d’activités ; – l’examen au cas par cas de la situation sur les différents axes routiers du canton. Il n’est pas certain que la stratégie élaborée par le DI respecte les différents critères susmentionnés. En outre, elle s’oppose clairement au libre choix du mode de transport inscrit dans notre constitution. Le DI est animé par une volonté de dissuader les gens de venir en voiture en ville pour des raisons idéologiques, et dit s’appuyer sur une LMCE qu’il détricote au fil de ses décisions, alors qu’elle est le fruit d’un large compromis, adoubé en votation populaire par 69% des votants en 2016. Le DI ne semble pas tenir compte non plus du résultat de la votation sur l’initiative « Rues pour tous » en mars 20019, rejetée par 74,9% du peuple genevois, ni d’un sondage mené par le TCS auprès de la population sur la généralisation du 30 km/h en localité10. 84% des répondants sont attachés au régime de vitesse actuellement en vigueur dans les localités. 9 10 Le Temps, édition du 05.03.2001 : https://www.letemps.ch/suisse/linitiative-rues-rejetee-massivement Communiqué de presse du TCS, 11.01.2022 : https://www.tcs.ch/fr/le-tcs/presse/communiques-de-presse-2021/la-vitesse-enlocalite-doit-respecter-la-hierarchie-et-les-fonctionnalites-du-reseau-routier.php PL 13204 10/15 En outre, le Grand Conseil a été saisi de plusieurs autres textes relatifs à la stratégie du DI, à savoir les motions M 279011, M 282312 et M 283013. Tous ces textes sont actuellement à l’étude de la commission des transports. Il est regrettable que le DI, par son arrêté, passe outre les travaux du Grand Conseil et contourne le processus démocratique. Par sa stratégie, le Conseil d’Etat, au travers du DI, et par voie d’arrêté, va à l’envers de la volonté de la LMCE qui consacre le respect de la hiérarchie du réseau routier. La seule approche par la limitation des vitesses est déficiente. Il faut avoir une stratégie globale et cohérente. Selon les configurations, il vaut mieux fluidifier le trafic, plutôt que l’entraver. Le TCS a par ailleurs marqué son opposition sur la mesure prévoyant de limiter la vitesse sur 48 axes structurants en zone urbaine, souhaitant plutôt les laisser à 50 km/h, de jour comme de nuit14. En ce qui concerne les services d’urgence, une généralisation du 30 km/h en localité allongera inévitablement le temps d’intervention, notamment pour les professionnels et volontaires de piquet à domicile, ceci au détriment des victimes qui comptent sur ces services. Il faut noter également les conséquences que cela peut avoir sur le transport professionnel, les taxis et chauffeurs, mais aussi les commerçants et les petites et moyennes entreprises, pour qui les conditions d’approvisionnement seront touchées : le temps de livraison est un facteur déterminant dans la fixation du prix final. Une généralisation du 30 km/h en milieu urbain, associée à d’autres entraves, a pour conséquence de pousser les commerces à s’installer en dehors des centres urbains, diminuant ainsi leur attractivité. Il convient de souligner également les incohérences de la politique du Conseil d’Etat en matière de mobilité : la mise en œuvre de la LMCE prévoit par exemple une régulation des feux visant à fluidifier le trafic15, notamment sur les axes structurants et la ceinture urbaine ; d’un autre côté, le même Conseil d’Etat prévoit de limiter la vitesse sur ces mêmes axes, contrevenant au principe de fluidité du trafic mentionné dans la LMCE, ainsi qu’à l’objectif visant une amélioration de la vitesse commerciale des transports collectifs. 11 12 13 14 15 https://ge.ch/grandconseil/data/texte/M02790.pdf https://ge.ch/grandconseil/data/texte/M02823.pdf https://ge.ch/grandconseil/data/texte/M02830.pdf https://www.tdg.ch/les-chicanes-se-dressent-contre-les-rues-et-routes-a-30-km-h351402109511 https://www.ge.ch/document/programme-ambitieux-accelerer-mise-oeuvre-loimobilite-coherente-equilibree-lmce 11/15 PL 13204 Il n’est pas certain par ailleurs que la stratégie du Conseil d’Etat en matière de lutte contre le bruit routier atteigne ses objectifs. La pose d’un radar anti-bruit préventif sur l’avenue Wendt en collaboration avec le SABRA a en effet démontré qu’un très faible pourcentage (1%) des usagers commettent des incivilités en atteignant des seuils critiques (pics de bruit). Si une baisse de la vitesse engendre globalement une baisse du volume moyen, les pics de bruit subsistent et sont commis par une poignée d’utilisateurs du réseau routier, notamment ceux qui contreviennent aux prescriptions légales, notamment les véhicules trafiqués et les utilisateurs volontairement bruyants : une personne qui adopte un style de conduite sportif en ville avec un scooter trafiqué peut générer 60 fois plus de bruit qu’un usager au comportement adapté avec un véhicule homologué. Des campagnes de prévention et de répression semblent donc plus adaptées qu’une mesure affectant l’immense majorité d’usagers qui se comportent sans commettre d’incivilités. L’effet sonore d’une réduction de vitesse dépend de divers facteurs, tels que la constance du trafic ou la typologie des véhicules. Pour que l’effet soit optimal, le trafic doit être fluide, ce qui évite en outre les pertes de capacité. Il faut aussi éviter les obstacles (p. ex. les rehaussements) et maintenir les contacts visuels. Une réduction de la vitesse de 50 à 30 km/h entraîne une baisse moyenne du niveau sonore comprise entre 2 et 4,5 dB. Les pics de bruit sont moins fréquents et moins élevés en dessous de 30 km/h, mais ils subsistent. Dans les faits, la comparaison avant-après ne permet pas d’obtenir une réduction de vitesse d’environ 20 km/h, de sorte que le potentiel de réduction sonore se révèle bien inférieur. Enfin, il convient de mettre en perspective les excès constatés lors des mesures prises pendant un mois sur cette avenue rectiligne : seuls 0,3% des usagers ont dépassé les 84 dB sur plus de 140 000 véhicules, la proportion ayant dépassé les 90 dB étant marginale. En conclusion, on peut s’interroger sur la nécessité d’appliquer des mesures qui touchent l’ensemble des usagers de la route, alors que les excès émanent d’un nombre très restreint d’entre eux. Par ailleurs, les premiers résultats sur la généralisation du 30 km/h à Lausanne montrent un certain nombre de problématiques, comme un problème de lisibilité16. Il faut ajouter que les différenciations des vitesses autorisées de jour ou de nuit sur des axes comme la ceinture urbaine posent des problèmes juridiques évidents. 16 https://www.lemanbleu.ch/fr/Actualites/Geneve/2022012189127-Bilan-mitigepour-la-limitation-a-30km-h-a-Lausanne.html PL 13204 12/15 En outre, le TCS a mandaté un sondage indépendant17 révélant que 68% des répondants vivant en zone urbaine sont opposés à une réduction de la vitesse maximale. Par ailleurs, près de trois quarts des répondants (73%) souhaitent que la limitation de vitesse à 30 km/h soit réservée aux routes d’intérêt local (p. ex. quartiers d’habitation). 85% des Romands sont également convaincus que le 30 km/h généralisé sera néfaste pour les services de secours. Il convient de reconnaître l’importance de lutter contre les nuisances sonores liées au bruit routier, en particulier pour les riverains qui y sont exposés. Pourtant, cela ne devrait pas passer de manière absolue par une limitation de la vitesse. Pour être efficaces, les mesures doivent être ciblées, axe de circulation par axe de circulation. Le côté absolu d’une limitation systématique de la vitesse aurait pour conséquence des risques de congestion importants sur certains axes déjà saturés, et parfois stratégiques comme le pont du Mont-Blanc et la route du Pont-Butin. La LMCE impose expressément à la ceinture urbaine la caractéristique d’un axe homogène et fluide. Une limitation systématique de la vitesse à 50 km/h ayant pour effet de réduire la capacité de la voirie irait contre les principes de la loi et la volonté populaire. En limitant trop la vitesse sur la moyenne ceinture, on retirerait à celle-ci une grande partie du caractère incitatif, voulu par le législateur, dans le but de reporter sur cette infrastructure le trafic privé que l’on ne veut plus voir transiter par le centre. Dans le cadre d’une pesée d’intérêts, il conviendrait ainsi plutôt de pérenniser, en principe, la vitesse de 60 km/h sur la partie du tracé de la ceinture urbaine où c’est possible. La régulation de la vitesse serait ainsi examinée au cas par cas, en fonction (1) des différentes heures du jour et de la nuit et (2) des différentes zones traversées – zones d’habitations, zones commerçantes ou de bureaux, zones industrielles. Les limitations mises en œuvre devront également prendre en compte l’effet sur la vitesse commerciale des transports publics sur les voiries concernées. En dehors de la limitation de la vitesse, doivent être pris en compte les autres moyens technologiques permettant de réduire le bruit routier, comme la pose de revêtements phonoabsorbants. Il convient en outre de prôner des aménagements qui, par les suppressions de feux et la création de passages piétons paysagers dénivelés, apportent de la fluidité et de la sécurité au trafic et limitent les nuisances sonores liées aux freinages et redémarrages. 17 https://www.tcs.ch/fr/le-tcs/presse/communiques-de-presse-2021/la-vitesse-enlocalite-doit-respecter-la-hierarchie-et-les-fonctionnalites-du-reseau-routier.php 13/15 PL 13204 On peut citer l’exemple de la ville de Bruxelles qui a imposé une limitation à 30 km/h sur l’ensemble de son territoire, mais avec les exceptions suivantes : la vitesse sur les axes pénétrants et structurants est limitée à 50 km/h et sur la ceinture urbaine à 70 km/h. Des aménagements des feux permettent de réduire le bruit routier. Les taxis ont demandé aussi des aménagements pour le weekend et des signalisations intelligentes pour les heures de pointe, ce qui a été accordé par la ville de Bruxelles. Tenant compte de l’ensemble des éléments mentionnés ci-dessus, les auteurs du présent projet de loi proposent de redonner un peu de compétence au Grand Conseil en la matière – une question aussi importante, qui implique un changement fondamental de la politique de mobilité à travers le canton, mérite un débat et un vote au parlement – mais aussi d’affiner la LMCE pour en faire respecter la lettre et l’objectif, et d’apporter les modifications nécessaires aux autres lois liées à la mobilité, toutes aussi importantes que la LMCE. Commentaires article par article Modifications à la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée Article 5 Cette modification tient compte de l’importance de la moyenne ceinture en matière de report du trafic de transit. Le département a prévu notamment des mesures rassemblées sous le thème de la « ceinture urbaine » visant à mettre en œuvre une ceinture routière ayant pour vocation de contourner le centre-ville en offrant un itinéraire attractif au trafic de transit, et contribuant à pacifier l’hypercentre et les centres urbains, tout en permettant d’accéder aux différents secteurs et quartiers du cœur de l’agglomération. Cette modification répond par ailleurs à l’article 3, alinéa 2, lettre c, prévoyant un axe « homogène et lisible ». Article 5A Cet article vise à mettre en œuvre une stratégie en matière de vitesse maximale répondant au principe de proportionnalité et à la hiérarchisation du réseau routier, ainsi qu’à l’article 190, alinéa 2, de la constitution genevoise. Il consacre par ailleurs la possibilité offerte au Grand Conseil de se prononcer démocratiquement sur cette stratégie. PL 13204 14/15 Article 7 Cette modification vise à garantir la bonne fluidité du trafic sur les axes routiers structurants, à éviter une saturation des petites rues et à préserver les quartiers : si la vitesse est la même partout, les gens iront au plus court. Par ailleurs, elle évite également de toucher les transports publics, notamment en zone I, où la vitesse commerciale de ceux-ci est déjà faible, en privilégiant les mesures d’assainissement excluant la réduction de vitesse maximale. Modifications à la loi sur la mobilité Article 12A Cette modification vise à inclure dans la loi sur la mobilité, qui constitue une loi-cadre en matière de mesures liées à la mobilité, le respect de l’article 190, alinéa 2 de la constitution genevoise. Article 13 Cette modification vise à inclure à l’article 13 la modification apportée à l’article 12A. Modifications à la loi sur le réseau des transports publics Article 2 Cette modification vise à limiter les conséquences d’une baisse de vitesse maximale sur certains axes routiers sur la vitesse commerciale des transports publics genevois, déjà la plus faible de Suisse, évitant ainsi des surcoûts non négligeables pour le maintien de l’offre. La modification répond par ailleurs aux principes et buts de la loi sur le réseau des transports publics. Modifications à la loi sur les routes Article 3 Cette modification vise à inclure, dans la loi sur les routes, le respect de l’article 190, alinéa 2 de la constitution genevoise. La baisse de la limite de vitesse touche l’ensemble des usagers, alors que seule une infime minorité d’entre eux présentent des comportements provoquant des nuisances sonores. Une uniformisation des limitations de vitesse dans les zones considérées risque de remettre en cause la hiérarchie 15/15 PL 13204 des réseaux routiers. Le risque est important de voir les usagers privilégier les itinéraires aux distances les plus courtes, ce qui pourrait accroître le trafic routier dans les quartiers. Il est donc nécessaire de maintenir la logique de la LMCE, selon laquelle certains axes primaires doivent pouvoir absorber rapidement un volume de trafic important (en particulier dans la zone II), tandis que le réseau secondaire peut être développé dans l’optique de réduire le nombre de véhicules et de ménager les intérêts des riverains et des adeptes de la mobilité douce, en réduisant notamment les limitations de vitesse ou en façonnant des zones spécifiques (zones 30, zones de rencontre). Le présent projet de loi vise à inclure ces différents éléments et à suivre la lettre comme l’esprit de la LMCE, telle que votée par le peuple en 2016. Au vu de ces explications, les auteurs vous remercient, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un accueil favorable au présent projet de loi.